TPM, les balles mono-métalliques françaises

Se lancer sur le marché des projectiles pour fusils de précision à longue et très longue
distance est un pari risqué. Surtout lorsqu'il s'agit d'une petite société française dont ce
n'est pas l'objet initial. Mais face au quasi monopole américain, les projectiles TPM ne
cessent de s'améliorer pour devenir un challenger sérieux de ce côté-ci de l'Atlantique.




De gauche à droite : balles TPM calibre .264'' 120 gr, .285'' 124 gr, .285'' 124 gr Moly et .
285'' 140 gr



Décolletage et usinage de précision

La gamme de balles TPM est fabriquée et commercialisée par les Établissements
PLUBEAU et Cie à Auxelles bas, situé dans le Territoire de Belfort. Spécialisée depuis 5
générations dans le décolletage, cette société a été créée en 1911 et sa production est
destinée à des secteurs d'activité aussi variés que les domaines ferroviaire, hydraulique,
brosserie, moteurs électriques, échafaudage ou matériel médical. Lors de la Première
Guerre Mondiale, l’entreprise a usiné des parties du célèbre canon de 75 mm modèle
1897. Fort de son expérience dans le décolletage de précision, c'est donc tout
naturellement que le gérant actuel des Établissements Plubeau, O. LACREUSE,
passionné de tir, notamment à longue distance, a eu l'idée de proposer des projectiles
mono-métalliques de sa propre conception et fabrication. Mais avant de se lancer dans
l'aventure, il a fallu d'abord passer le CQP, Certificat de Qualification Professionnel de
commerce d'arme et de munition, parcours dérogatoire délivré par la FEPAM (1) pour ceux
n'ayant pas suivi un cursus en école d'armurerie. Une fois le précieux sésame en poche,
et l'agrément d'armurier pour les catégories C et D délivré par la Préfecture acquis, il ne
restait plus qu'à choisir les types de projectiles sur lesquels travailler.


De gauche à droite : balles TPM308S de 150 gr, TPM308P de 155 gr, TPM308P 155 gr
Moly, TPM308P166 de 166 gr, TPM308PHY de 168 gr, TPM308XTLD V5 de 179 gr et
TPM308XTLD V5 de 179 gr traitement au nitrure de bore hexagonal

Le parc de machines est étoffé : près d'une dizaine de tours à commande numérique
jusqu'à 7 axes, en plus d'un centre d'usinage 4 axes. La réalisation de projectiles de petits
diamètres nécessite un tour dimensionné en conséquence : inutile de disposer d'une
machine surdimensionnée dont les tolérances ne seraient pas en rapport avec le résultat
souhaité. Ainsi les projectiles sont usinés sur un tour 7 axes CITIZEN A20 équipé d'une
commande numérique Fanuc 32i. Ses qualités lui permettent de tenir des tolérances d'une
précision relevant du micron (en conditions contrôlées, un peu plus en conditions réelles),
ce qui se traduit par une variation de masse de l'ensemble des pièces d'environ 0,2 %, soit
0,3 grains pour une balle de 150 grains. L'alimentation automatique est effectuée par un
embarreur LNS type Alpha S2 avec des barres d'une longueur de 3 mètres. Le CITIZEN
A20 est équipé d'une poupée mobile et d'une contre broche permettant l'avancement
progressif de la barre au fur et à mesure de son usinage. Deux outils sont nécessaires à
l'usinage du projectile : le premier à charioter qui effectue l'essentiel du travail, le second à
tronçonner qui permet la séparation de la balle de la barre. Ces deux outils travaillent au
plus près de la broche, ce qui évite tout porte-à-faux et défaut de concentricité. La
production d'un projectile dure de 16 à 22 secondes en fonction du type usiné, ce qui
donne un rendement horaire d'environ 150 à 200 exemplaires.

Des balles « historiques »…

Avant de penser à créer des projectiles, il convenait de sélectionner le type de matière à
usiner… L'avantage de disposer de matériel performant pour fabriquer une balle monométallique
est qu'il est possible de produire toute forme voulue. Outre une grande
concentricité, son homogénéité favorise un positionnement constant du centre de gravité
par rapport à son axe géométrique. Le principal désavantage, face à un projectile
classique à noyau de plomb chemisé, est constitué par la moindre densité de l'alliage de
cuivre. Celle du laiton est de 8,73 g/cm3, 8,96 pour le cuivre et 11,3 pour le plomb. À
dimensions identiques, une balle mono-métallique à base de laiton ou de cuivre sera
forcément plus légère, et sa densité de section moindre. Pour le tir à longue distance, c'est
un handicap par rapport aux balles classiques, cette perte de masse entraînant
comparativement une décélération plus rapide à vitesse initiale identique.


De gauche à droite : balles TPM308S de 150 gr, TPM327D de 189 gr et une balle originale
de 8mm Mle 1898D

Le choix s'est porté sur différents alliages à base de cuivre, certains contenant du plomb,
d'autres pas. Le but est d'obtenir une usinabilité compatible avec les tolérances voulues
sans être pénalisant pour la durée de vie du canon. Ainsi les propriétés de déformation à
froid ont été testées à de multiples reprises en piscine. L'examen des projectiles après
récupération, combiné à l'emploi d'un système KOLBE à base d'accéléromètre, a permis
de constater les différences entre plusieurs nuances d'alliage. Celles sélectionnées sont
optimisées pour permettre une bonne impression des rayures sur la surface de la balle
tout en limitant l'usure de la prise de rayure et l'effort de forcement.


De gauche à droite : balles TPM calibre .408'' de 426 gr, TPM408TLD de 413 gr et
TPM408TLD V9 Bis de 420 gr


Le choix des premiers projectiles s'est porté sur un des plus fameux qui ait été réalisé : la
balle de 8 mm Mle 1898D de notre Lebel national. Son adoption en 1898, avec des formes
très novatrices, augmente sensiblement la portée efficace de la cartouche de 8x51 R
Lebel. De nombreux prototypes sont testés avant que soit finalement sélectionnée la balle
« D » dont la paternité est due au capitaine DESALEUX. L’appellation « D » n'a pas été
donnée par la première lettre du nom du créateur du projectile, mais tout simplement
parce qu'il s'agissait de la variante « D » des prototypes d'essais nommés de « A » à
« E ». Le profil de la balle est bi-ogival, la seconde ogive étant l'arrière fuyant ou restreint
de culot (boat tail). Réalisé tout d'abord au tour à décolleter pour les prototypes, la balle D
est ensuite produite par étampage à froid et compression. Elle est composée de laiton
90/10, (90 pour cent de cuivre pour 10 pour cent de zinc), et non de bronze comme
souvent entendu. La balle comporte une gorge de sertissage de 0,15 à 0,2 mm de
profondeur qui n’apparaît qu'en 1905 (auparavant était pratiqué un redan). Le projectile
pèse 12,8 grammes (soit 197,5 grains) mais avec des tolérances pouvant aller de 12,65 g
à 13,8 g. La forme tout à fait révolutionnaire pour l'époque de la balle D n'a aujourd’hui pas
pris une ride. L'ogive a un profil tangent à un peu plus d'une dizaine de calibres alors que
l'arrière fuyant a un angle de 4,3°.


Cartouches de .338 Lapua Magnum avec balle TPM338TLD de 250 gr : la longueur de la
munition empêche toute alimentation par chargeur aux cotes C.I.P.

La TPM327D ne pèse que 189 grains (12,24 grammes) comparativement aux 197 grains
de la balle d'origine. Mais à la différence des balles D de production de guerre, la TPM a
des tolérances sans commune mesure, ce qui en pratique favorise grandement la
précision des armes d'époque (2). Son diamètre maximum de 8,315 mm permet son
utilisation indifféremment dans des armes modifiées « N » ou non. Avec un coefficient
balistique pour la fonction G7 de 0,290, vérifié avec un radar Doppler et confirmé
personnellement «sur le terrain», c'est sans aucun doute le meilleur choix pour faire
revivre nos vieux ancêtres lorsque leur état de conservation est bon.


Sur la gamme TLD, une gorge spécifique est aménagée sur la projectile afin de contrôler
le positionnement du point de transition de la couche limite de l'état laminaire à turbulent


Dérivée directement de la TPM327D, la balle TPM308S de 150 grains (9,72 grammes) est
la première fabriquée en calibre .308'' (7,82 mm). Elle reproduit peu ou prou les
dimensions de sa grande soeur avec un profil d'ogive très sécant, minorée évidemment en
fonction de son calibre. La surface réduite de la portée cylindrique du projectile en contact
avec les rayures a été limitée, la rendant plus adaptée aux canons très serrés en fond de
rayures ou au plat des rayures (cas de certains tubes de 7,5x54 Mas). Principal défaut de
ce projectile : le positionnement de la gorge de sertissage est prévu pour qu'une cartouche
de .308 Winchester reste dans la tolérance maxi C.I.P. Le profil sécant de l'ogive peut
entraîner un « vol libre » significatif sur certains chambrages, notamment ceux optimisés
pour tirer des balles lourdes hors cotes C.I.P. Son coefficient balistique pour la fonction G7
est de 0,230 en moyenne. Sa masse réduite permet de le tirer dans des canons rayés au
pas de 12 pouces (30 cm au tour) et moins.


De gauche à droite : balles TPM338P242 de 242 gr et TPM338TLD de 250 gr


Le profil d'ogive sécant à été abandonné pour un profil tangent pour la balle TPM311ME.
Avec son diamètre maximum de .311'' (7,90 mm), ce projectile est principalement destiné
aux calibres 7,62x54 R ou .303 British. Avec une masse de 168,5 grains (10,92 grammes),
il comporte deux gorges dont la plus haute fait office de gorge de sertissage. Son Cb G7
est en théorie de 0,230 soit identique à la balle TPM308S de 150 grains à profil sécant. Je
n'ai pas eu l'occasion de tester ce projectile, mais à l'avenir je compte mener quelques
essais avec un de mes Mosin Nagant M39 finlandais.


Cartouches de .308 Winchester avec balle TPM308s aux cotes C.I.P.

...à celles plus « modernes »


Mis à part les balles mono-métalliques pour armes réglementaires, O. LACREUSE a
rapidement orienté sa production sur des projectiles à profil beaucoup plus moderne. Le
but est évidemment de tenter de concurrencer les grands classiques du tir à longue
distances : balles de match à culot restreint, noyau plomb et chemise tombac, munies ou
pas d'une pointe polymère, profil sécant ou hybride. Ces dernières années, le prix de ces
projectiles a sensiblement augmenté alors que l'offre ne cesse de s'agrandir. Le fait de
pouvoir modifier la forme et les dimensions d'une balle mono-métallique permet
d'optimiser son indice de forme et donc ses performances, notamment dans les domaines
transsoniques et supersoniques, ce qui compense en partie leur densité moindre par
rapport à une construction classique. Mais l'élaboration de nouveaux projectiles n'est pas
aussi facile que cela pourrait paraître. Si la question du choix de la nuance d'alliage à
base de cuivre a été globalement résolue, il n'en est pas de même pour la forme et la
longueur de l'ogive, de la partie cylindrique, et du culot restreint. Vouloir simplement copier
ce qui se fait de mieux chez la concurrence peut se traduire par de rapides désillusions
lors des essais en cible.



Projectile en cours d'usinage sur tour CITIZEN A20 : l'outil à charioter travaille au plus près
de la broche pour éviter tout problème de pote-à-faux

C'est pourquoi la mise au point de la gamme « P » de TPM a pris plus de temps et a
nécessité de nombreuses variantes avant validation et commercialisation de certains
exemplaires. Le profil d'ogive choisi n'a rien d'une nouveauté. Si B. LITZ parle du profil
hybride dans ses ouvrages, il ne s'agit pas d'une découverte. Ce profil allie la grande
tolérance du positionnement de la balle par rapport à la prise de rayure au profil sécant,
améliorant l'indice de forme et en conséquence le coefficient balistique. La longueur et
l'angle du culot restreint (Boat Tail) est aussi d'importance, un angle classique de 7°
n'étant en rien un gage de stabilité et de performance. Mais si vous voulez essayer, rien
de plus simple ! Les Établissements PLUBEAU peuvent réaliser tout type de projectiles
(mis à part ceux à effets spéciaux classés en catégorie « A » évidemment) selon vos
desiderata à condition de commander au moins 200 exemplaires avec devis préalable.


L'outil à tronçonner vient de séparer le projectile de la barre, ce dernier est retenu à
gauche par la contre-broche.



Pour réaliser ce type de projectile, la validation par des essais sur cible papier est
absolument nécessaire, la seule simulation informatisée du comportement en vol de ces
projectiles restant insuffisante pour constater son évolution lors des transitions des
domaines supersonique, transsonique et subsonique. De nombreux tireurs confirmés ont
été (et sont toujours !) mis à contribution pour développer cette gamme de balles, citons
entre-autres B. GINESTE, recordman du monde de tir à longue distance.

L'alliage choisi comporte une forte proportion de cuivre, outre une densité plus élevée que
le laiton, sa dureté et son usinabilité évite l'emploi de gorges destinées à réduire la surface
de contact avec le canon, et donc limiter l'effort de forcement. La présence de ce type de
gorge est généralement néfaste aux qualités aérodynamiques du projectile, augmentant
sa traînée et donc réduisant son coefficient balistique. Le profil d'ogive hybride donne une
meilleure marge au positionnement de la balle par rapport aux rayures, à la différence d'un
simple profil sécant.


L'outil à charioter est prêt à reprendre l'usinage de la balle suivantes



Attention cependant aux diamètres en fond de rayure de vos canons. En fonction de ces
dimensions, le comportement du projectile peut être aussi bon que mauvais. Prévu
initialement pour des canons dont le diamètre en fond de rayure est au moins égal ou
supérieur aux cotes mini C.I.P., l'utilisation de cette gamme dans des tubes plus serrés
peut aboutir à un encuivrage très rapide et une perte accélérée de la précision.
Cependant on peut observer des phénomènes contradictoires. A titre d'exemple, la balle
TPM338P242 a été tirée avec un enfoncement de projectile similaire en .338 Lapua
Magnum dans un fusil VICTRIX Scorpio (diamètre en fond de rayures de 8,575 mm) et un
Sako TRG42 ( diamètre en fond de rayures de 8,60 mm). A charge de poudre identique, la
vitesse était supérieure de près de 40 m/s pour la TRG 42. De même, la charge de poudre
devait être augmentée d'environ 0,40 gramme pour obtenir une vitesse identique alors
même que la Victrix a un diamètre en fond de rayure plus serré que celui de la TRG… La
différence de localisation du cône de forcement dans le canon de chacun de ces fusils est
sans doute la cause principale expliquant cette différence de comportement.


Groupement de 5 coups de balles TPM338TLD de 250 gr à 100 m avec une Remington
700 Armeca montée avec un canon Lothar Walther rayé au pas de 10'' au tour : ce
chargement donne satisfaction


Il convient de préciser qu'à ce propos, la tolérance des canons aux balles monométalliques
reste aléatoire. Sur les très nombreux essais que j'ai effectués ces dernières
années dans une dizaine de calibres et une bonne vingtaines de canons différents,
certains n'acceptaient pas ce type de balle, la dispersion restant incompatible avec une
utilisation en concours. Avant de commander des projectiles mono-métalliques en
quantité, je ne saurai trop vous conseiller d'en essayer une boîte préalablement en
adoptant une procédure de rechargement faisant varier le type et la charge de poudre,
l'amorce puis la valeur d'enfoncement du projectile.
La balle TPM264P120 est destinée aux calibres .264'' (6,70 mm). Elle nécessite un pas de
rayure d'au moins 8,5'' au tour (21,6 cm) pour être suffisamment stabilisée
gyroscopiquement. Son coefficient balistique pour la fonction G7 est de 0,260 pour le
domaine supersonique.


Modélisation d'un projectile TPM avec ogive à rayon variable et gorge spécifique pour
contrôle de la couche limite

Pour le diamètre .284'' (7,21 mm), le projectile TPM284P138 est toujours en cours de
développement. Les versions précédentes d'une masse de 124 et 140 grains n'ont pas
donné satisfaction.


Même arme, mêmes éléments de rechargement, seul le type de poudre a changé : les
balles mono-métalliques sont très sensibles à toute variation de paramètres…


Les balles TPM308P155 et TPM308P166 diffèrent par leur masse (155 et 166 grains, soit
10,04 et 10,75 g) et par la longueur de leur culot restreint. Si la première passe bien dans
les canons rayés au pas de 12'' (30,5 cm), la seconde plus longue et plus lourde nécessite
un pas de 11'' (28 cm) lorsque tirée dans la plage de vitesse du .308 Winchester. Ces
deux projectiles ont des coefficients balistiques pour la fonction G7 respectifs de 0,240 et
0,260 (pour ce dernier, vérification avec un radar Doppler Weibel avec un vol très stable
jusqu’à des distances de 1 500 m). Le gain de vitesse de la balle de 155 grains, plus
légère que sa consoeur, peut être un avantage, mais son comportement en vol doit être
comparé à la TPM308P166 avant de faire un choix définitif.


O. LACREUSE en pleine séance d'essai, et avec le sourire.


Dernier projectile clôturant la gamme actuelle de balles « P », la TPM338P242 est
destinée principalement au .338 Lapua Magnum, calibre aujourd'hui incontournable du tir
à longue distance. Avec une masse de seulement 242 grains (15,7 grammes), elle a une
stabilité gyroscopique suffisante dans un pas de 11'' (28 cm) au tour. Les canons rayés au
pas de 12'' (30,5 cm) peuvent avoir une stabilité gyroscopique marginale en fonction de la
vitesse initiale. Son coefficient balistique G7 de 0,340 est supérieur aux balles de 250
grains (16,2 g) Lapua ou de 252 grains (16,3 g) RUAG. Argument de poids face à la
concurrence : son prix. Comptez un tiers de moins que les Lapua et près de la moitié des
Hornady Match de 250 gr…

Pour la très longue distance…

Dernière née de la gamme TPM, la série TLD est plus particulièrement destinée au tir à
longue et très longue distance. L'engouement suscité par l'organisation du premier King Of
2 Miles à Canjuers en avril 2019, et au Prince Of 1 Mile à Caylus en juillet de cette même
année, a clairement démontré l'intérêt porté par les tireurs français pour cette discipline.
Pour atteindre une cible à plus de 3 kilomètres avec un nombre réduit de coups, il faut un
fusil et des cartouches adaptés. Rien n'est laissé à l'approximation, même si le côté
aléatoire des conditions météo rend toujours l'exercice incertain. Dans ce domaine, les
projectiles employés sont quasi exclusivement du type mono-métallique où les Américains
tels que Cutting Edge et Warner Tool Company se taillent la part du lion.


Toutes les données relevés de vitesse depuis 3 ans ont été effectué avec un LabRadar. Ici
le contrôle des vitesses s'effectue avec deux exemplaires, on notera la différence d'un
mètre par seconde sur la dernière cartouche tirée.


La conception et la réalisation de cette gamme de balles constituent l'aboutissement de
l'expérience accumulée par les Établissements Plubeau depuis la commercialisation de
leurs premières productions. La recherche d'un meilleur profil et l'étude de son
comportement en vol reste une priorité, ce qui nécessite de nombreux essais sur le pas de
tir. Pour concurrencer les fabricants américains, de nouvelles solutions ont été adoptées.
La première consiste en l'utilisation d'ogives à rayon continûment variable (profil de Sears-
Haack), et non plus seulement à profil sécant ou hybride permettant une traînée minimale.


Développement de la dernière version de la balle TPM408TLD de 420 gr dans le fusil
Custom de B. GINESTE monté par ARMECA. Si a 100 mètres ça groupe, il reste à le
confirmer plus loin…


La série TLD est aussi caractérisée par un centre de gravité placé beaucoup plus en avant
que ce qui est généralement rencontré sur les projectiles conventionnels à noyau plomb,
de manière à limiter les perturbations lors de la traversée du domaine transsonique, au
prix d’une dispersion théorique légèrement plus élevée. La forme du projectile assure
aussi la transition de la couche limite de l'état laminaire à l’état turbulent, même pour les
faibles nombres de Reynolds rencontrés dans le domaine transsonique, et assure un vol
régulier tout au long de la trajectoire.

Une gorge, qui ne sert pas nécessairement à faire baisser l'effort de forcement et ne
constitue en rien une gorge de sertissage, est aménagée en un endroit précis avec des
dimensions particulières. Elle permet d’assurer que la couche limite sera totalement
turbulente avant d’atteindre le boat-tail, et donc limiter la traînée, principe qui se rencontre
aussi sur les balles « Lazer » de Cutting Edge ou « Flat Line » de Warner Tool Company.
Cette combinaison entre ogive à rayon variable et aménagement d'une gorge pour la
transition de la couche limite permet de s'affranchir d'un méplat à l'extrémité supérieure
sans altération de la traînée aérodynamique. Sans ces caractéristiques, un projectile avec
une extrémité pointue est contre-productif, la traînée étant augmentée. Des études
poussées ont été menées en ce sens par les ingénieurs de l'armement français au début
du XXème siècle. C'est pourquoi l'essentiel des projectiles de Match pour le tir de
précision à longue distance disposent de ce méplat.


Quelques projectiles TPM de calibre .308'' et .338'' récupérés dans la butte de tir : leur
déformation limitée ne permet pas cependant de les étudier aussi bien que lors d'un tir
dans une piscine


Cependant la mise au point de ces projectiles ne saurait se contenter de modélisations
informatiques. Dans le domaine du « petit calibre », la validation d'un projectile ne peut se
faire qu'avec une expérimentation rigoureuse. Sans possibilité de prédire correctement la
stabilité dynamique d'un projectile, son comportement ne peut être vérifié qu'en le tirant.
C'est justement l'objet des nombreux essais effectués avant commercialisation, et de
nombreux prototypes ont été préalablement testés et écartés. A ce propos, le
rechargement des balles mono-métalliques est beaucoup plus sensible aux variations des
composants que les projectiles de construction classique. Un simple changement de
marque d'amorces, ou de type de poudre peut augmenter la dispersion par 3 ou 4 : on
peut se retrouver avec un groupement initial de l'ordre de la demie minute d'angle à plus
de 2 MdA au suivant ! Lors de mes multiples essais, j'en ai quelquefois fait les frais. Dans
ce cas, il ne faut pas se décourager, et essayer d'autres combinaisons, mais certains
canons refusent obstinément de grouper avec ce type de projectiles. Une fois le bon
rechargement trouvé, le tireur reste confronté à la gestion toujours aléatoire des conditions
météo. Si des groupements d'une demie minute d'angle sont régulièrement constatés à
longue distance, preuve du bon fonctionnement de ces projectiles, l’honnête intellectuelle
m'interdit de garantir systématiquement ce résultat. Il y a bien d'autres paramètres qui
restent peu ou pas maîtrisables…


De très nombreux essais ont été effectués en faisant varier charge et type de poudre,
amorce et valeur d'enfoncement de la balle.

L'avenir

Toujours passionné par le TLD et « l'Extreme Long Range », O. LACREUSE a créé une
équipe de tir pour participer activement au Ko2M. Elle compte parmi ses membres
l'épouse de B. GINESTE et utilise exclusivement des balles TPM.


Courbes de traînée de 7 projectiles obtenues à partir de relevés avec radar Doppler
Weibel : l'utilisation d'un C7 de 0,261 permet d’obtenir un résultat très satisfaisant pour
toute vitesse supérieure à Mach 0,95.

Si, au départ, la conception et la production de projectiles mono-métalliques ne
constituaient qu'une faible proportion de l'activité des Établissements PLUBEAU, son
développement prend de plus en plus d'importance, ce qui a incité son gérant à recentrer
sa production dans ce domaine. Si d'autres projectiles, notamment pour la gamme XTLD
en calibre .375'' (en collaboration avec B. PUT), .416'' et .460'', sont toujours à l'étude
avant validation et commercialisation, des balles de chasse vont être prochainement
proposées. Basées sur le principe de la déformation et non de la fragmentation, elles
feront l'objet d'un futur article une fois leur développement terminé.


Au fur et à mesure du temps, le conditionnement des boîtes de balles TPM a évolué

Profitant de son expérience d'usinage et de décolletage, la fabrication d'outils de
rechargement devrait aboutir d'ici la fin de l'année. Destinée principalement au
rechargement de précision, notamment des « gros » calibres adaptés au TLD et à l'ELR,
ils devraient se décliner en version manuelle pour presse à crémaillère, mais aussi en
version filetée au pas de 7/8 de pouce par 14 et au pas de 1 1/4 de pouce par 12. La mise
en ligne de leur nouveau site Internet (3) proposera aussi à terme la commercialisation
d'éléments de rechargement, des lunettes March, et des armes anglaises GS PRECISION
(canon Benchmark, chassis KRG, action ultimatum).



Essais de rechargement avec balles TPM308TLD166 en .300 Winchester Magnum. La
longueur totale la munition dépasse la cote C.I.P.

Tout petit, tout petit on se sent à côté de cela, à nouveau superbe travail

Christian, un grand MERCI à toi pour ce nouvel article très intéressant. Je viens de le parcourir rapidement mais une lecture approfondie s'impose, comme toujours c'est exhaustif et captivant, que du bonheur, merci !

Je n'ai qu'un seul regret concernant TMP, c'est qu'il ne puisse pas fabriquer pour le .50...

impressionnant, comme d'habitude
des balles en .284 pour ceux qui tirent encore au 7/08 .... merci pour eux
une petite vidéo de la séquence d'usinage peut être ? a moins qu'elle ne divulgue des secrets de fabrication .

Pas loin de la planche des belles filles dans les Vosges (juste au dessus de Belfort) cela fait quelque années qu'ils travaillent à des produits au top
Un savoir faire à la française, très bien décrit dans ton post
ça donne envie de pousser mon futur. 308 vers le rechargement

sylvain 91 a écrit:impressionnant, comme d'habitude
des balles en .284 pour ceux qui tirent encore au 7/08 .... merci pour eux
une petite vidéo de la séquence d'usinage peut être ? a moins qu'elle ne divulgue des secrets de fabrication .

Non, pas de vidéo.
Pour cela, il va falloir que je me rende sur place...

Wolfoni a écrit:Christian, un grand MERCI à toi pour ce nouvel article très intéressant. Je viens de le parcourir rapidement mais une lecture approfondie s'impose, comme toujours c'est exhaustif et captivant, que du bonheur, merci !

Je n'ai qu'un seul regret concernant TMP, c'est qu'il ne puisse pas fabriquer pour le .50...

Pour le .50'', c'est à l'étude.

Bjr. Quel serait l'intérêt sur du 22lr??? Meilleure prise de rainures ?? Stabilité de la trajectoire ?

bebel72 a écrit:Bjr. Quel serait l'intérêt sur du 22lr??? Meilleure prise de rainures ?? Stabilité de la trajectoire ?

Un coefficient balistique bien supérieur à celui d'une .22 Lr classique pour une meilleure tenue au vent pour le tireur ISSF, en plus d'une tension de trajectoire plus tendue pour de l'ELR en .22 Lr.

Ça a le mérite d'être ainsi alléchant !!

Faut voir ce que ça donne sur le "terrain", les effets d'annonce...

Et surtout le coût....

Merci CB pour ce très intéressant article.
Je trouve que ça manque de données sur la 308XTLD utilisée dans une 308...

sylvain 91 a écrit:des balles en .284 pour ceux qui tirent encore au 7/08 .... merci pour eux

Il faut les contacter, ils font du sur-mesure à partir de 200 pièces commandées

cb45400 a écrit:Faut voir ce que ça donne sur le "terrain", les effets d'annonce...

ça c'est clair, le tir n'échappe pas au marketing

bebel72 a écrit:Et surtout le coût....

C'est presque secondaire, on parle d'ELR22 et donc de distances de 300m, 400m et au delà.
Ce n'est pas avec des munitions à 3,50€ la boite que l'on y arrivera.
En hunter, il est déjà courant d'utiliser des munitions à 15€ voire jusqu'à 25€ la boite.